Amanda se sentait comme le petit poucet.
A l’exception faite qu’elle n’était résolument pas petite, qu’elle ne semait pas des cailloux mais des indices, et que ce qui l’attendait au bout de la route n’était à priori pas un Ogre mais bien un mutant. Qui cependant semblait résolument posséder des bottes de sept lieues tellement il était impossible à tracer.
Ca l’avait rendu folle, au début.
Tout avait commencé quand Bellatrix, une scientifique intégrée au corps traqueur, avait fait un rapport dans lequel elle indiquait le comportement très inquiétant d’un mutant qui l’avait à deux reprises attaquée. Elle disait penser que c’était un tueur à gage qui avait un contrat sur l’organisme entier des traqueurs.
Audacieux.
Amanda avait tout de suite voulu s’en chargé mais elle s’était vite cassée les dents sur un mur. Il était impossible à retrouver. Tout bonnement impossible. Alors ça l’avait fait hurler de colère, elle avait passé des nuits entière à tenter de trouver quelque chose, la moindre minuscule trace de son pouvoir dans les registres, son visage dans les criminels, tout.
Mais rien.

Alors Amanda s’était résignée.
Elle allait le faire venir à elle.
Les gens comme lui, les excellents chasseurs, péchaient souvent par leur ego surdimensionné et, avec un peu de chance, celui là n’y échapperait pas non plus.
La jeune femme avait donc laissé de nombreux indices permettant de la traquer. Un sms non sécurisé, une photo postée sur internet etc. Bref, c’était une chasse au trésor et le premier prix était la jugulaire de ce chasseur de tête un peu trop fouineur.


Amanda était prête.
Elle avait revêtu une petite robe, des talons hauts et portait à bout de bras un fusil antimutant qui envoyait des décharges paralysantes ainsi que des balles bloquant la mutation. De toute façon elle était aussi à l’aise à main nues qu’armée d’un tank donc elle s’en fichait éperdument.
Le lieu qu’elle avait choisi était stratégique : le toit d’un immeuble.
Elle avait une équipe posée dans les étages prête à intervenir en cas de soucis et pouvait également prendre la poudre d’escampette en sautant, un drone étant prêt à la rattraper en cas de chute.
Il faisait nuit noire mais les lumières de la capitale nippone éclairaient comme en plein jour.
Et puis de toute façon s'il ne la trouvait pas c'est qu'il le faisait exprès, dans la mesure où un gigantesque dirigeable rose frappé du nom "AMANDA" flottait au dessus du bâtiment.
Oui, Amanda Hatsuyo avait tout préparé pour cette capture.
Et une fois n'est pas coutume, elle avait aussi préparé les canons à paillettes.

Lorsqu’il se matérialisa à quelques mètres d’elle, Amanda retint tout sursaut qui aurait pu trahir sa surprise. Elle avait beau essayer, elle ne s’y faisait pas. Cette capacité que certains avaient de se téléporter d’un bout à l’autre de la carte en clignant des yeux... ça la rendait folle. Elle en était presque mortellement jalouse à vrai dire. Mais bien entendu elle ne disait rien. Si posséder un tel pouvoir rimait avec devenir un mutant traqué et en marge de la société, elle n’accepterait pour rien au monde.

Elle détailla donc sa cible.
Et elle ne détailla pas grand chose, en fait. Rien qu'une vague paire de jambe et une fumée opaque blanche qui couvrait tout le reste.Amanda était nerveuse.
C’était probablement la première fois que cela lui arrivait lors d’une traque, être nerveuse. Habituellement, elle planifiait tout à la seconde près, se renseignait sur sa cible pendant des semaines et montait un plan parfaitement adapté, comme elle l’avait fait pour Laam, Naomi ou encore Wisdom. Mais là elle n’avait rien sur lui.
C’était stressant.
Elle avait caché le fusil qu’elle avait plus tôt dans les mains juste derrière elle, dans un recoin du muret.
Lorsqu’il prit la parole, elle eut un léger frisson imperceptible.

▬ Je ne savais pas que certaines de mes cibles étaient si charmantes. Vous allez me passer les menottes ? J'ai déjà hâte que l'on en arrive à cet instant.

Amanda eut un rire cristallin.
Ses escarpins vertigineux tapaient contre le bitume du toit. Derrière elle, le vide, devant elle, probablement le vide aussi vu l’assurance de son ton.
Ceci dit elle connaissait des beaux parleurs qui n’avaient pas grand-chose dans le pantalon.
Deuxième fois en cinq minutes qu’elle pensait à Laam Rusnir, fou !

▬ Je ne savais pas que certaines de mes cibles étaient aussi agréables ! Quant aux menottes je suis désolée mais je n’aime pas la viande prémâchée, vous me feriez bien l’honneur de vous battre un peu... non ?

Elle s’était rapprochée doucement tout au long de sa tirade jusqu’à arriver à quelques centimètre de son visage. Lorsqu’elle prononça le « non », elle bougea très vite, reculant d’un pas pour lever la jambe et frapper en pleine face sa cible.