Tout en haut de cette colline où princesse s’étendait, princesse l’attendait. Princesse qui elle n’aimait pourtant pas perdre son temps. Le voir s’enfuir, lui donnait ce même frisson que l’éclat des ongles venant effriter le tableau d’un bruit stridulant. Chaque seconde réside d’une grande richesse et chaque minute, chaque heure, sont d’une grande noblesse. Couronné par le temps, il n’y a pour elle que l’aisance du présent – de ce présent, de ce cadeau. Elle déteste prévoir, elle déteste savoir ce qu’il adviendra de demain, de plus tard, de tantôt. À savoir qu’il n’y a que cet instant, que ce moment qui compte réellement. Et lui, gaspille sa fortune sans rancune. Une chance que c’était lui, une chance que c’était son ami – son meilleur ami. Gabriel Evans aka Princesse Conasse comme qui dirait Circé. Des surnoms à la con, ils en ont à ne plus savoir quoi faire, à ne plus savoir se taire. Ils se les lancent à tout bout de champ, comme ces défis. Cap ou pas cap? Un principe simple qui fit l’éloge de leur relation depuis des années, depuis ce moment, où ils se sont rencontrés. Au sommet de leur forteresse, tout a commencé en le voyant arriver. Elle ne se souvient plus pourquoi il était là, pourquoi il se trouvait là, tout ce qui l’importait c’est qu’il y soit sans quoi, elle ne l’aurait jamais rencontré. Circé lui demanda d’un air piteux s’il pouvait bien jouer avec elle. Il dit oui. N’ayant ni en tête le jeu du docteur, ni papa maman, elle lui sortit sans crier gare mais plutôt :


▬ PÉNIS!


Le jeu s’intitulait pénis. Clair, net  et  précis. Le but? Il n’y en avait pas. Il fallait tout simplement le crier de plus en plus fort parmi ces gens – ces inconnus.


▬ Aller! Pas cap de le dire plus fort ‘spèce de brunâtre.


(Oui dans sa tête à elle, ça sonnait plutôt comme une insulte, maintenant elle en a plutôt honte). Voilà une brève idée de cette relation qui s’enchaîne, sous une tonne de défi, à la file indienne. L’un après l’autre, furent gravés sur cet arbre en haut de leur colline (d’ailleurs on sait jamais pourquoi mais il y a toujours un arbre en haut d’une colline ça doit être une tradition arbrastique qui sait).
À force d’y jouer, à for ce de s’y relancer, ils se sont attachés, liés. Circé n’a jamais pu avoir de relation stable à cause de Gabriel. Triste à dire, mais vrai. Aux yeux de tous ses copains, ils semblaient bien trop proche d’elle pour en venir à ne pas être jaloux de lui. Elle avait beau expliquer qu’elle n’avait jamais couché avec lui,  cela n’était pas pour le mieux, car la place que prenait Gabriel ne compensait pas la justesse de ses paroles. Puis tant pis. Elle abandonna. Copain, couple, ça ne lui disait plus rien. Jamais n’aurait-elle abandonné Gabriel pour qui que ce soit. Princesse connasse, salope, prostitué, elle s’en fichait. Pour elle, il n’était que son meilleur ami, celui avec qui les paris et les conneries avaient rendez-vous, sans compter la confiance qu’elle lui accordait. Et puis voilà qu’elle l’attendait, à nouveau. Et elle l’attendra aussi longtemps qu’il le faudra.
C’est Gabriel après tout.