Hier tu avais reçu un message, te convoquant au White Zone. Oui enfin … Convoquer est un bien grand mot. Disons juste que l’on t’a donné rendez-vous. Mais qui hein ? L’espèce de grand oiseau. Bha oui, l’homme à la tête de pigeon … Ça ne serait pas plutôt l’oiseau au corps d’homme ? Tu secoues la tête doucement, amusée par tes réflexions. Sauf que ton sourire s’arrête là, à présent, tu te trouves devant la porte du bar. Et il n’est pas question de rire, tu ne sais pas vraiment pourquoi tu es là. Il faut dire qu’il a été vague sur le sujet. Ce qui t’a fait venir ? Un prénom. Eh oui rien que ça. Rin Ichiari. A vrai dire tu te sens coupable, maintenant que tu l’as éloigné de ta vie, tu ne sais même pas ce qu’il est devenu. Bien sûr, curieuse comme tu es, tu n’as pas pu t’empêcher de rappliquer pour savoir ce qu’il veut de toi.
Pour éviter de boucher l’entrée plus longtemps, tu entres dans la salle et après un regard au loin, tu repères les plumes de celui qui t’attends. Et c’est en prenant bien ton temps, que tu vas t’assoir en face de lui.

« On demande à me voir ? »

Les salutations trop polies ne sont pas pour toi. Elles ne l’ont jamais étés d’ailleurs. Tu penches la tête et ta tresse vient cogner contre ton épaule. Et c’est en jetant un œil sur la pendule devant le bar que tu te rends compte que tu es bien en retard. Un large sourire s’installe sur tes lèvres, et sans être gênée le moins du monde, tu hausses les épaules.
Bon, j'suis là pour quoi monsieur Poussin ?

La première question qui te vient à l’esprit est pourquoi Lux s’intéresse à ce gang de mutants. Ou tu devrais plutôt dire, à cet ancien gang.

« J'aimerais parler du plus jeune de leur groupe. Rin Ichiari. Malheureusement je n'ai que très peu d'informations, vu son âge. Quelques relevés de notes en baisse et des absences injustifié de son lycée, à la limite. »

Tu n’es pas surprise, c’est pour lui que tu es là. Mais une ampoule s’allume dans ta tête. Pas grand monde savait pour son pouvoir alors ? C’est plutôt évident en y réfléchissant bien, mais tu as du mal à te dire que les gens ne se servent pas de leur don pour menacer les autres, ou juste par profit. Mais comme tu te doutes, tout le monde n’est pas comme toi Saaya, t’es juste à part.

« Ma question sera simple. Comment un enfant aussi mauvais en sport, l'air chétif et qui avait l'air de passer plus de temps à la bibliothèque qu'au stade pouvait faire parti de l'élite d'un gang aussi dangereux que Shangri-La? »

Les coudes posés sur la table, et le menton sur tes mains, tu fixes ton regard dans le sien. Les documents ne t’intéressent pas le moins du monde alors tu n’as pas besoin de faire plaisir à l’oiseau, et poser tes yeux dessus. Tu fais mine de réfléchir, mais tout ça n’est que de la mise en scène. Tu sais bien pourquoi il était entré dans ce gang. Ça t’avait tellement surprise quand le gosse tout mignon s’était transformé en cette chose verte. Tu avais clairement essayé de garder la tête froide pour ne pas montrer ta peur, mais ce squelette foutait vraiment la trouille.

« Vous ne vous doutez pas un peu de la réponse ? C’était un mutant lui aussi. Vous pensez vraiment que j’aurais passé du temps avec lui si ça n’avait été qu’un gamin ordinaire ? »

Tu redresses le menton, pour sauver les apparences. D’ailleurs tu ne sais pas comment cette info a pu aller jusqu’à Lux. Ils ont l’air pas mal au courant sur de beaucoup choses. Et ça te dérange légèrement. Mais tu sais que si tu peux cacher des informations, tu le feras sans aucune hésitation.

Oh, on dirait bien que tu as réussi à l’énerver un peu. Est-ce que c’était ton but ? Non pas vraiment, mais voir jusqu’où une personne peut être patiente, est drôle à tester.

« Merci de me prendre pour un imbécile. Les humains n'étaient pas acceptés dans Shangri-La, et seuls les mutants les plus déterminés et les plus puissants y étaient acceptés. »

Un petit haussement d’épaule de ta part et un jeté d’œil en l’air. Tu es devenue une pro pour ces choses-là. Montrer que rien ne t’atteint, rester détachée aux choses qui ne te concernent pas. Ou faire semblant. Ce qui est ton cas ici pas vrai ?
Mais le piaf réussi à t’atteindre. Ton regard est attiré par ses photos, et malgré toi, tu finis par les fixer, une à une. Et étrangement, tu sembles pâlir. Fini, le petit sourire en quoi ou les manières arrogantes, ce que tu vois là te retourne l’estomac. Tu détournes bien vite les yeux, et semble reprendre ton souffle.

« Expliquez moi comment un enfant a pu participer à ça. Non, pire. Expliquez moi comment un enfant a pu crever les deux yeux d'une adulte et la battre presque à mort. Expliquez moi comment Shangri-La a pu accepter qu'un gosse participe à ce genre de réunions macabres. »

Rin a participé à ça ? Réunion macabre qu’il dit ? C’est plus un massacre qu’autre chose. Une boucherie, une horreur. Tu passes une main sur ta tempe, cherchant tes mots. Mais qu’est-ce que tu peux bien dire ? Finalement tu ne le connaissais pas tant que ça, et son monstre non plus. D’ailleurs tu n’as pas trop d’informations sur lui non plus.

« Tout ce que je peux dire c’est qu’il avait une autre … Forme ? J’sais pas comment appeler ça. C’était comme s’il y avait deux personnes dans un même corps. Une espèce de schizophrénie ? Mais à chaque esprit son corps défini. Rin et son corps de gosse. Et … il se faisait appeler Shredd je crois. Une espèce de squelette tout vert. Et il était pas franchement aimable. »

Tu n’en reviens toujours pas. T’es si secouée que tu viens attraper la boisson de Kuyumi et en bois quelques gorgées. Sur le coup tu te fiches bien de ce qu’il peut y avoir dedans. T’as juste besoin de détourner tes pensées.

Regarder un corps mutilé, ok c’est pas la joie. Mais si en plus on te dit que c’est clairement la faute de ce quelqu’un que tu pensais inoffensif, c’est plus compliqué à digérer. Et tu as été proche de ce quelqu’un pas vrai Saaya ?
Tu secoues la tête, comme en réponse à tes interrogations.
C’était le squelette.
Cette facette-là te rassure quelques peu et tu peux de nouveau regarder Kuyumi en face.

« Bien. J'ai eu ma réponse, je suppose. Je m'attendais à quelque chose de plus utile, mais au moins, je sais pourquoi Sato a bien voulu lui faire confiance. »

Tu l’aimais bien au fond, l’oiseau. Mais sa phrase ne te plait pas et s’il n’avait pas continué tu lui aurais clairement signifié que votre entrevue était finie. Puisque tu ne lui apportes que des informations inutiles.

« Encore une question, cette fois ne concernant pas du tout Ichiari. Pourquoi est-ce que quelqu'un comme vous, qui se retient de vomir en voyant une photo, ne se range t'elle pas? Les combats sont violents et cette guerre de gang n'est pas un jeu. Qu'est-ce qui peut vous motiver suffisamment pour continuer à se battre pour des broutilles? »

Il me tape sur le système.
Ou alors ça ne serait pas plutôt toi qui prends mal tout ce qu’on te dit ? Ce n’est certainement pas la faute de cet homme si tu ne supportes plus de raconter ton passé et tes intentions aux gens que tu ne connais pas plus que ça.

« Et ça aussi vous allez en faire un rapport à Lux ? Je ne vois pas pourquoi j’vous parlerais de moi. Si j’ai daigné me déplacer jusqu’ici, c’est pour parler de Rin, et pas pour parler de mal place dans un gang ! Un jeu vous dites ? Vous pensez vraiment que ça m’a amusée de passer mes nuits dehors ? Ou de me réveiller un matin à l’hôpital, sans me souvenir de mon entrée ? Croyez-moi, je sais très bien pourquoi j’me suis engagée là-dedans. Et mes raisons ne vous regardent pas ! »

Tu t’es peut-être un peu trop enflammée non ? Beaucoup trop même. Maintenant que tu as élevé la voix, d’autres clients vous regardent.
Pour quoi je continue à me battre ?
T’as même pas la réponse à portée de main. C’est devenu une habitude pour toi de passer au repère déposer le butin de tes maigres vols. Mais les batailles ? Pourquoi tu continues de te faire du mal ? Tu as bien une réponse, mais elle ne te convient pas. Alors tu repousses la question dans un coin de ta tête.

« Hmm. Désolée d’avoir crié aha. »

Tu te mords la langue, puis après un instant tu soupires.

« J’peux vous aider autrement ? »

C’est bien, rattrape-toi.

Tu l’écoutes sans vraiment le regarder. Tu laisses ton regard trainer sur les autres tables, sur les autres personnes présentes ici, mais ton attention est bien tournée vers son bec qui continue de sortir mot sur mot. Tu te demandes d’ailleurs comment est-ce qu’il peut parler. A moitié oiseau, tu veux bien, mais il n’a pas hérité de la partie la plus jolie et la plus pratique des volatiles. Et si tu l’avais connu un peu plus que ça, tu serais allée voir ce qui se trouve sous son casque. Mais là, c’est déjà compliqué d’échanger sans hausser le ton de ta voix, donc pour les touchés amicaux on repassera.

« Vous essayez de m’aider si je comprends bien hmm ? Mais dans quel but ? Qu’est-ce que vous attendez ? Ne me dites pas, ‘par charité’ parc que je ne vous croirais pas. Personne ne fait les choses gratuitement ici. »

Après un instant, tu décides de reprendre la parole, vraiment intéressée cette fois. Et si tu arrêtais de te poser les mauvaises questions ?

« Trahie ou délaissée hein ? On verra. »

Tu repousses une énième fois le serveur qui tient absolument à ce que tu consommes quelque chose, et tu t’étires lentement. Tu ne comprends pas vraiment Kuyumi, et encore moins ses intentions, mais ça faisait longtemps que tu n’étais juste pas sortie prendre l’air pour voir quelqu’un. Certes pour parler de macchabées et de disparu. Mais au moins tu ne tournes pas en rond dans ton appartement.

« Au fait, vous me croyez enfin quand j’vous dit que j’suis une mutante ? »

Le ton amusé que tu emploies ici, est clairement pour détendre l’atmosphère. Parce que c’est bien joli tout ça, mais tu as juste l’impression d’être en présence d ton psy. Et raconter ta vie c’est pas ton truc, alors c’est toujours pratique de savoir détourner la conversation.

« Par charité, croyez le ou non. Si j'ai rejoins Lux et non un gang, c'est parce que je me préoccupe de mes semblables. Je n'y gagne rien à par la fierté d'avoir aidé quelqu'un dans le pétrin, et d'avoir amélioré la réputation des mutants de cette ville. »

Eh bien après tout, pourquoi pas ? Tu ne comprends pas vraiment ce qui le pousse à faire tout ça, mais il y a une chose de sûre : toi, tu n’en serais pas capable. Ne rien attendre en retour de personne que l’on connait à peine ? Très peu pour toi. Mais avoue que ce qui te gène surtout, c’est qu’il veuille t’aider.
Encore une fois tu l’écoute sans faire plus attention que ça à son discours. Il ne te croit pas, mais il a la preuve que tu es bien une mutante. Eh bien tant mieux, parce qu’à présent tu es plutôt fière de ton pouvoir. Tu as appris à vivre avec.

« Et qu’est-ce que vous faites si une mutante a décidé de faire baisser cette réputation ? Ce n’est qu’une simple question bien entendu. »

Sauf qu’on ne sait jamais avec toi. Es-tu juste curieuse, voir taquine, ou il se cache autre chose derrière cette phrase ? En fait tu cherches juste un moyen de l’avoir au moins une fois. C’est fatiguant les gens qui ont toujours réponse à tout. Non, c’est carrément chiant en fait. Et puis tu as besoin de te changer les idées, après l’entretien sur Rin, tu ne tiens plus en place et vu que tu n’as pas déjà envie de partir, tu laisses ton esprit vagabonder sur des idées complètement loufoques. Comme celle que tu viens d’avoir, mais après tout, on ne se refait pas.

Et il repart dans un discours que tu n’écoutes plus. Blablabla les gangs, blablabla la mutation. Sauf qu’une de ses phrases arrive à attirer ton attention. Et disons que ça te met un peu en colère. Bon rien de grave, tu as déjà entendu pire. Mais juste de quoi l’emmerder un peu plus, après tout, c’est là-dedans que tu excelles.

« Lux n'est pas un gang, mademoiselle Ohara. Nos méthodes diffèrent des vôtres, drastiquement. »

Alors tu te lèves de manière assez dramatique, pour donner un peu plus de matière à ton départ et une fois devant lui tu t’arrêtes pour lui lancer quelques mots.

« Dites que nous sommes des brutes et ça ne changera pas le sens de votre phrase pour moi, pigeon-san. De toute façon cette entrevue m’ennuie, alors je vous laisse avec votre verre. Oh et puis y a pas de quoi pour les renseignements. A la prochaine. »

Sans en demander plus, tu agites la main et tu sors du White Zone. Bon ok, c’était pas vraiment de la colère. Juste que tu commençais à trop réfléchir avec ses questions et ses paroles morales. Et dans ces cas-là, tu préfères juste partir, les mains dans les poches. Et avec un peu de son argent. Toujours surveiller ce que l’on met sur la table quand tu es dans les parages.